L’Europe comme perspective et comme référence

 

Une des lacunes majeures du monde abertzale – je rappelle que je n’emploie plus le mot de « mouvement », si peu approprié à la réalité d’aujourd’hui… se prétendant de « gauche » mais aussi de l’abertzalisme centriste-libéral du Parti Nationaliste Basque (EAJ/PNV) est de concevoir son action politique au sein des deux États-nations, espagnol et français, qui se sont accaparés le Pays Basque… sans se projeter au-delà de ce cadre contraint, en particulier en direction de l’Europe en tant que perspective et référence. Oh, certes, il y a de grandes déclarations d’intention, situant le combat abertzale comme partie intégrante de la construction d’une « Europe unie des peuples et des nations » ; il y a aussi des relations, plus ou moins établies et suivies, entre partis politiques de « nations sans États » comme on dit dans les milieux branchés ; des alliances existent également entre organisations « autonomistes / indépendantistes » au sein des institutions de l’Union européenne, plus précisément au Parlement européen ; quelques « grandes messes » comme les Ghjurnate di Corti (Journées de Corte) se déroulent aussi chaque année, occasion pour des abertzale soi-disant « organisés » de se la jouer « super-indépendantistes » parmi leurs coreligionnaires pendant que le reste de l’année ils participent allègrement et avec gourmandise au bon fonctionnement des institutions espagnoles et françaises… (suite…)

Collectivité spécifique Pays Basque : l’apprentissage de l’autonomie

Manifestation pour réclamer une Collectivité Territoriale Pays Basque, Mauléon-Licharre, le 30/11/2013

La création, le 1 janvier 2017, après un processus de consultation et de vote des conseils municipaux des communes du Pays Basque nord, de la Communauté d’agglomération Pays Basque a permis de donner une existence politique et juridique à l’ensemble constitué par les trois provinces de la Basse-Navarre, du Labourd et de la Soule. Ce simple fait est en soi un évènement d’importance, car avant cette mise en place de la première institution officielle qui le représente en tant qu’entité politico-juridique, le Pays Basque nord n’avait d’autre existence que celle de destination touristique ou qu’en tant que sujet d’intérêt culturel. (suite…)

Un abertzalisme qui a perdu le nord…

Quelque temps après que l’organisation clandestine Iparretarrak eut déclaré une « trêve » – la fin de la violence politique ne sera jamais en revanche formellement annoncée – pour abonder dans le sens du processus de paix dit de ‘Lizarra-Garazi’ signé en août 1998 entre ETA et les deux camps politiques représentant le nationalisme basque, quelqu’un qu’on ne pouvait guère soupçonner d’accointances avec l’abertzalisme m’avait dit tout de go : « IK (Iparretarrak) a été un rempart contre la volonté de ETA de placer le mouvement abertzale du Pays Basque français (sic !) – sous sa coupe »… Pour aussi abrupt que puisse apparaître le propos, je n’ai aucune hésitation à dire que j’étais d’accord avec son analyse et les évolutions politiques de ces dernières décennies en Pays Basque nord n’ont fait que démontrer la réalité de cette assertion. (suite…)

Les contorsions idéologiques de la gauche abertzale « officielle »

La gauche abertzale (autonomiste/indépendantiste basque), que ce soit en Pays Basque sud (sous tutelle de l’Etat espagnol) oui en Pays Basque nord (subordonné à l’État français) est née de l’abertzalisme historique positionné, en termes idéologiques ou de conception de société, au centre droit libéral. Évidemment, cet héritage gène quelque peu aux entournures certains des abertzale de gauche d’aujourd’hui, mais les faits sont têtus et ne peuvent être niés, sauf à verser dans une mauvaise foi à caractère pathologique… D’autant plus que, à raisonner sans oeillères idéologiques, on ne voit pas très bien ce qui pourrait être embarrassant dans cette filiation ? Car si EAJ-PNV ou Parti Nationaliste Basque, matrice de l’abertzalisme contemporain, au moins en ce qui concerne le Pays Basque sud, est, dès sa fondation en 1895, un parti politique qui puise ses références dans le catholicisme et défend un modèle de société basé sur des valeurs oscillants entre conservatisme et réformisme, il n’est en aucune façon classable dans une droite « dure ». EAJ-PNV est le prototype de la démocratie chrétienne, du christianisme social… avec toutes les contradictions que cela suppose de gérer, lorsque, dans un même parti politique, on retrouve des acteurs de l »oligarchie bancaire et industrielle, de la bourgeoisie commerçante, de la propriété terrienne… et les classes sociales moins favorisés – ou carrément défavorisées  – du prolétariat ouvrier. (suite…)